INTERVIEW
- L'histoire de VoxPop en sept dates ?
Juin 2007
Sortie d’un numéro 0 de
VoxPop.
¾ de ce numéro est imprimé et le ¼ restant des pages blanches. Ça commence bien, cette affaire.
27 octobre 2007
Sortie du premier numéro de
VoxPop dans les kiosques.
Pour la petite histoire, deux semaines avant, on(*) était en Islande avec Samuel Kirszenbaum et on recevait des MMS de Mathieu Zazzo parti superviser l’impression avec notre D.A. Audrey Elbaz. On était émus, mais moins finalement que le jour où l'on a eu le résultat entre les mains.
(*Jean-Vic Chapus)
27 décembre 2007
NTM en couverture de
VoxPop. Un de nos meilleurs coups d’entretien et la meilleure vente du magazine.
Avril 2008
Jack Lang en couverture de
VoxPop pour un numéro "Musique et Politique". Notre pire vente, et de loin. Il y a eu la jurisprudence “Ex-Ministre 80's” ensuite.
Juillet 2008
Première sélection pour le service photo de
VoxPop, dans le cadre des Nuits de l’Année à Arles. Cela se reproduira les années suivantes et l'on n’est pas peu fiers car la photo, ça compte beaucoup dans
VoxPop.
28 avril 2009
Exposition des productions photo de
VoxPop entre les murs de la galerie Thierry Marlat à Paris.
18 décembre 2012
Dernier numéro de
VoxPop dans la fierté d’avoir tenu cinq ans à l’équilibre et en réalisant le magazine exigeant et pop auquel on rêvait au départ, alors que le contexte pour la presse n’était, disons, pas forcément facile.
- Le rôle de l'image, dans VoxPop ?
VoxPop : Dès le début, l’ambition était de mettre l’image au centre du magazine. Travailler avec une équipe de jeunes photographes ainsi qu’avec des talents plus confirmés. Tous ayant leur particularité de travail, numérique, argentique, noir et blanc… il fallait respecter toutes ces écritures, tout en gardant une cohérence éditoriale et visuelle.
- Flash de cinq moments forts dans l'histoire de VoxPop ?
- Le plus cauchemardesque ?
VP : On a dû se faire annuler des couvertures au dernier moment cinq ou six fois, mais ça, c’est presque marrant.
- Le plus dingue ?
VP : En terme de dinguerie, certaines rencontres et certains reportages resteront : Daniel Johnston - un chanteur maniaco-dépressif et obèse traqué en Hollande, un road trip au Portugal dans le cadre d’un festival de snow board (!) pour notre premier sujet couverture, un groupe d’enfants new-yorkais de 13 et 14 ans.
- Le plus trippant ?
VP : Pour notre numéro 3. La majorité des sujets au sommaire étaient annulés, en retard, ou totalement nuls. Il ne nous restait qu’une grosse semaine pour remplir ce numéro spécial Angleterre. Alors on est parti à Londres trois jours et on a enchainé interviews, concerts, photos, corrections, etc. À part ça, se retrouver chez Bryan Ferry, dans les studios de Brian Eno, ou face à certaines icônes de cette rédaction comme NTM, Robert McLiam Wilson, Stephen Malkmus, David Lynch ou quelques anciens d’
Actuel, pour parler de feu Jean-François Bizot et de son rapport à la musique… c’était forcément trippant.
- Le plus rigolo ?
VP : Sans doute réaliser un numéro assez tordu sur le papier : un numéro sur les années en 1, 1981, 1991, 2001, 2011. La théorie au départ c’était : “Ce sont des années qui, à chaque fois, donnent le tempo du reste de la décennie, autant artistiquement que politiquement et sociétalement” On y tenait à cette théorie globale alors il a fallu l’écrire, l’illustrer avec des photos, des interviews, etc. À l’arrivée, un des numéros dont on est collectivement le plus fier.
- Le plus "tout"... (même si vous ne pouvez pas citer les noms) ?
VP : Cinq années au top. Voilà ce qui restera le plus “tout”. Quand on s’est lancés, on se disait raisonnablement qu’on ne ferait que trois numéros, parce que l'on est parti en indépendants. Alors rien que le fait de s’arrêter au bout de cinq années pleines c’est, comme disent les jeunes, le kif absolu.
- Pourquoi VoxPop, c'est fini ?
VP : Parce qu'on est romantiques et orgueilleux. Parce qu’on est raisonnables aussi. Surtout parce que nos limites (financières avant tout - l’indépendance ça oriente le tir) ne nous permettent pas d’envisager de continuer dans d’aussi bonnes conditions, voire surtout ne nous permettent pas de passer un pallier. Et puis peut-être que cinq ans, c’est bien pour un magazine. De toute façon, on se reverra.
Rencontre avec Jean-Vic Chapus, directeur de la rédaction de VoxPop
Une fois n'est pas coutume, ce mois-ci, Processus n'aura pas interviewé un photographe. Jean-Vic Chapus n'écrit pas avec la lumière, il écrit... avec un stylo. D'ailleurs, l'identité rédactionnelle de
VoxPop, au départ, c'est lui. Mais ça va quand même parler photo. Bien sûr.
INTERVIEW
- Pour commencer : Jean-Vic Chapus, dans VoxPop ?
Jean-Vic Chapus : Déjà moi dans
VoxPop, ça ne tient pas sans les autres. Ce serait même une totale imposture. Sinon, en vrac, rédacteur en chef, médiateur, capable d’emmerder le monde quand il a une lubie et de passer à autre chose quand la lubie s’est refroidie, etc.
- Comment la musique est-elle entrée dans votre vie ?
JVC : Réellement, quand j’avais 12 ans. Mon meilleur ami de l’époque, un Italien qui vivait dans une tour HLM, avait un grand frère qui me paraissait être le summum du cool. Il avait 16 ans, fumait des cigarillos, s’habillait à la mode ska et ramenait toujours des filles magnifiques. Par dessus tout, il nous laissait écouter ses disques tous britanniques : The Specials, The Smiths, Madness, The Selecter, Elvis Costello, les Dexys Midnight Runners. Je pense que cela a dû faire tilt à ce moment.
- Et la photo ?
JVC : Je ne la remarquais pas vraiment avant que le camarade Samuel Kirszenbaum, très pédago, m’emmène à des expos et surtout me fasse passer sa passion pour toutes sortes d’images. J’ai regardé autrement après. Et puis, bon, c’est bizarre mais je crois que les gens qui m’intéressent le plus sont quasiment tous des photographes. Ce qui est étrange tout de même.
- En photo, qui vous impressionne vraiment ?
JVC : Je ne suis pas vraiment quelqu’un qui est impressionné de nature. Mais bon comme il faut répondre, je dirais dans les photographes actuels... Mathieu Zazzo, Samuel Kirszenbaum, Julien Mignot, Delphine Ghossarossian, Louis Canadas, Audrey Cerdan, Rémy Artiges, Raphaël Neal, Manuel Braun, Jérôme Bonnet, etc, etc. Le fait qu'ils aient tous shooté dans
VoxPop n'a évidemment aucun rapport avec mon choix.
- Lequel de vos cinq sens fonctionne le mieux ?
JVC : La vue, ça percute directement dans le cerveau et ça donne envie de raconter de belles histoires.
- Quel autre métier auriez-vous aimé faire ?
JVC : Que toute la vérité soit faite : entraîneur d’une équipe de football, journaliste de faits divers et détective privé.
- Quel métier n’auriez-vous pas aimé faire ?
JVC : Tous les métiers en rapport avec la mode. Ou animateur télé, ça m’aurait bien gonflé je crois.
- Quelle est votre drogue favorite ?
JVC : Benson & Hedges, Platinum.
- Qu’est-ce qui vous fait réagir le plus de façon créative, spirituellement, ou émotionnellement ?
JVC : On ne va pas se mentir, ce sont quand même les filles. Les filles qui sourient…
- Qu’est-ce qui, au contraire, vous met complètement à plat ?
JVC : Les gens raisonnables.
- Quel bruit, ou quel son, aimez-vous faire ?
JVC : Il paraît que je ronronne.
- Quel bruit, ou quel son, détestez-vous ?
JVC : La chanson réaliste à la française peut me rendre odieux.
- Qui aimeriez-vous shooter pour mettre sur un nouveau billet de banque ?
JVC : Raymond Domenech.
- Quel est votre juron, gros mot, blasphème favori ?
JVC : "
Putain" revient souvent.
- Quel don de la nature aimeriez-vous posséder ?
JVC : Le don d’ubiquité.
- En quoi aimeriez être réincarné ?
JVC : En chat.
- À quoi vous sert l’art ?
JVC : À garder le contact avec mon adolescence.
- À quoi sert un photographe ?
JVC : À écrire des histoires auxquelles je ne pense pas.
SI VOUS ÉTIEZ
- Une couleur ?
JVC : Rouge.
- Une chanson ?
JVC : "The Train", de Franck Sinatra.
- Une pochette de disque ?
JVC : "Loveless", de My Bloody Valentine.
- Un sentiment ?
JVC : Justement d'être très sentimental.
- Un(e) artiste ?
JVC : Diego Maradona, voilà un artiste.
- Un alcool ?
JVC : Un vin chilien.
- Une œuvre d’art ?
JVC : La ville de San Francisco.
UN MAGAZINE + UN LABO
VoxPop & Processus
- Pourquoi avez-vous choisi Processus ?
VP : Nous étions déjà clients réguliers de Processus lorsque nous avons parlé du projet
VoxPop à Marie-Laure, qui dirige le labo.
On avait essayé de traiter nos images nous-mêmes pour le numéro 0 ; c’était une catastrophe. Après des nuits de travail vaines, nous sommes arrivés, pâles et suppliants au labo. Une fois de plus, Processus nous a accueilli les bras ouverts et, enthousiasmé par notre projet, nous a proposé de gérer tout le flux des images du magazine. Nous avons sorti un numéro 1 (et 28 numéros par la suite) irréprochables.
Processus s’est également impliqué dans nos projets d’exposition en sublimant les images publiées dans le magazine, afin de mieux les mettre en valeur aux cimaises.
L'ARRÊT SUR IMAGE du magazine VoxPop
Décryptage d'une des couvertures cultes du magazine : numéro #14, « Anarchie en France » : Action Discrète, par Jérôme Bonnet.
VP : Nous aimions tous le travail de Jérôme Bonnet, et, pour ce sujet hors-musique, nous voulions frapper un grand coup en proposant une image forte par un des meilleurs portraitistes actuels. La prise de vues s’est faite à Canal + devant un ascenseur ; on y retrouve tout l’univers de Jérôme Bonnet, allié au savoir-faire de Processus, dans l’exercice périlleux d’une couverture dynamique avec un groupe de personnes, ce qui n’est jamais simple. Nous voulions montrer que
VoxPop avait également l’ambition d’explorer d’autres univers que ceux strictement musicaux, et que l’on pouvait retrouver l’esprit punk à la télé. Pour la petite histoire, le message a dû titiller les autorités chinoises car l'un de nos abonnés, habitant Pékin, n’a reçu son exemplaire que deux mois après sa sortie ; l’enveloppe avait été ouverte et le magazine scrupuleusement feuilleté, comme en témoignaient les nombreuses traces de doigts présentes sur toutes les pages...
Interview : Sandrine Fafet
(Décembre 2012)